T... comme tragédie

 

Télévision

Si un gouvernement supprimait la télévision, les hommes s’entretueraient dans la rue, parce que le silence les terroriserait. (Entretiens)

Temps

Le temps est la croix sur laquelle l’ennui nous crucifie. (Le crépuscule des pensées)

Tout homme qui adhère au temps est un domestique. (Précis de décomposition)

L’enfer est le lieu où nous sommes condamnés au temps pour l’éternité. (La chute dans le temps)

Timidité

La timidité, source inépuisable de malheurs dans la vie pratique, est la cause directe voire unique, de toute richesse intérieure. (Écartèlement)

Tolérance

On ne devient tolérant que dans la mesure où on perd de sa vigueur, où l’on tombe gentiment en enfance, où l’on est trop las pour tourmenter autrui par l’amour ou la haine. (Histoire et utopie)

La complaisance pour l’adversaire est le signe distinctif de la débilité, c'est-à-dire de la tolérance, laquelle n’est, en dernier ressort, qu’une coquetterie d’agonisants. (Écartèlement)

Tragédie

Quand Eschyle ou Tacite vous semblent trop tièdes, ouvrez une Vie des Insectes – révélation de rage et d’inutilité, enfer qui, heureusement pour nous, n’aura ni dramaturge ni chroniqueur. Que resterait-il de nos tragédies si une bestiole lettrée nous présentait les siennes ? (Syllogismes de l’amertume)

Travail

Les hommes travaillent généralement trop pour pouvoir encore rester eux-mêmes. Le travail : une malédiction, que l’homme a transformé en volupté. Œuvrer de toutes ses forces pour le seul amour du travail, tirer de la joie d’un effort qui ne mène qu’à des accomplissements sans valeur, estimer qu’on ne peut se réaliser autrement que par le labeur incessant – voilà une chose révoltante et incompréhensible. Le travail permanent et soutenu abrutit, banalise et rend impersonnel. [...]Que chacun doive exercer une activité et adopter un style de vie qui, dans la plupart des cas, ne lui convient pas, illustre cette tendance à l’abrutissement par le travail. (Sur les cimes du désespoir)

Dans le travail, l’homme s’oublie lui-même ; cela ne débouche pas sur une douce naïveté, mais sur un état voisin de l’imbécillité. Le travail a transformé le sujet humain en objet, et a fait de l’homme une bête qui a eu le tort de trahir ses origines. Au lieu de vivre pour lui-même – non dans le sens de l’égoïsme, mais vers l’épanouissement –, l’homme s’est fait l’esclave pitoyable et impuissant de la réalité extérieure. (Sur les cimes du désespoir)

Trémousser (se)

Après tout, je n’ai pas perdu mon temps, moi aussi je me suis trémoussé, comme tout un chacun, dans cet univers aberrant. (Aveux et anathèmes)

Tristesse

La tristesse ouvre une porte sur le mystère. Celui-ci est, cependant, si riche que la tristesse ne cesse jamais d’être énigmatique. Si l’on établissait une échelle des mystères, la tristesse entrerait dans la catégorie des mystères sans bornes, inépuisables. (Sur les cimes du désespoir)

Nos tristesses prolongent le mystère qu’ébauche le sourire des momies. (Syllogismes de l’amertume)

La tristesse : un appétit qu’aucun malheur ne rassasie. (Syllogismes de l’amertume)

Tuer

Qui n’a pas eu le sentiment que tous doivent se tuer pour lui et lui pour tous – celui-là n’a jamais vécu. (Le crépuscule des pensées)

Tyran(s)

Un monde sans tyrans serait aussi ennuyeux qu’un jardin zoologique sans hyènes. (Histoire et utopie)

Les tyrans, leur férocité assouvie, deviennent débonnaires ; tout rentrerait dans l’ordre si les esclaves, jaloux, ne prétendaient eux aussi assouvir la leur. L’aspiration de l’agneau à se faire loup suscite la plupart des événements. (Histoire et utopie)

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