Ascension du pic de Barroude ou de Barrosa (2.745 m)

Accès routier  : Vallée de Bielsa, accessible de Saint-Lary par le tunnel Bielsa-Aragnouet. Trois kilomètres en aval du tunnel frontalier, juste après le lieu-dit Hospital de Parzan, garer son véhicule au niveau d’un petit pont à droite (panneau indiquant Rio Barrosa). Parking d’une trentaine de places. Départ à 1.500 m.

Dénivelée  : 1.300 m.

Horaire : 7 à 8 h A & R.

Difficulté : Itinéraire de moyenne montagne, sans difficulté pour le randonneur habitué à ce type de course.

Cartographie : Carte Pirineo N°4 au 1/40.000ème Parque nacional Ordesa y Monte Perdido (carnet explicatif en espagnol).

Bibliographie : Raymond Ratio & Louis Audoubert : 50 balades et randonnées dans le Haut Aragon (Editions Milan, 1995). Henry Russell : Souvenirs d’un montagnard (Editions Pyrémonde, 1999)

Au Moyen-âge, l’Hospital de Parzan était un hospice où on accueillait et soignait les pèlerins, les voyageurs et les malades de la région. Il n’en subsiste que des vestiges envahis par la végétation. D’autres ruines vont nous interpeller en bordure de piste : celles des installations des mines de Parzan. Dans ces montagnes étaient extraites du plomb, de l’argent, du zinc, de la fluorite, et surtout du fer. Les spécialistes affirment que l’exploitation des filons remonte à l’époque mégalithique, et n’a jamais cessé depuis. Le puerto de Barrosa est depuis des temps immémoriaux un lieu de passage entre la France et l’Espagne, s’y sont croisés des bergers, des colporteurs, des contrebandiers, des soldats, des pèlerins, des chasseurs, des réfugiés et autres terrassiers. La montée au col s’effectue dans le cadre enchanteur d’un cirque dominé par le pic de la Robinera. Puis apparaissent ceux de la Munia, de Troumouse et de la Sierra Morena. Quant au pic de Barroude, ce n’est pas l’apanage des seuls baroudeurs (le jeu de mot, reconnaissons-le, est facile), plus qu’un pic c'est une montagne russe de dômes caillouteux qui se révèle un belvédère remarquable sur le cirque de Barroude, pendant de celui de Troumouse, mais aussi sur la muraille de Barroude qui court du pic de Troumouse au pic de la Gela. Les personnes intéressées par le sujet se référeront au très beau site consacré au Cirque de Barroude : http://cirquedebarrosa.free.fr.

Suivre la large piste qui monte à travers bois direction Ouest. On passe devant des panneaux d’information sur l’exploitation des mines et divers vestiges des installations. La piste cède bientôt la place à un sentier balisé blanc et jaune qui suit la rive droite du rio, se fond dans un paysage de carte postale auquel ne manque ni les pins à crochets, ni les rhododendrons ni le torrent aux eaux effervescentes ni, tôt le matin, les hardes d’isards et les marmottes.

Arrivé au fond de la combe, on tourne le dos aux crêtes déchiquetées de la Sierra de Liena pour s’orienter vers le Nord. On traverse la rivière en se fiant aux cairns puis on atteint une cabane aménagée en refuge (1.745 m), sise au pied d’un amas de blocs erratiques.

S’élever sur la croupe herbeuse afin de récupérer le sentier muletier qui conduit au port. Bien tracé, il monte en lacets réguliers, laisse à gauche une cascade (2.000 m) et un verrou glaciaire puis traverse plusieurs ravines, passe sous des barres rocheuses.

Un dernier raidillon sur un terrain plus rocailleux nous amène à la large selle de Barroude (2.535 m). La ligne faîtière forme une barrière naturelle qui stoppe les brumes mieux qu’un poste de douanes. D’un côté, le versant français, noyé dans le brouillard ; de l’autre, l’espagnol, inondé de soleil. On aurait tort d’en rester là, le plus beau est à venir.

Un dernier raidillon sur un terrain plus rocailleux nous amène à la large selle de Barroude (2.535 m). La ligne faîtière forme une barrière naturelle qui stoppe les brumes mieux qu’un poste de douanes. D’un côté, le versant français, noyé dans le brouillard ; de l’autre, l’espagnol, inondé de soleil. On aurait tort d’en rester là, le plus beau est à venir.

Du col, suivre vers l’Est la crête débonnaire où les chèvres viennent brouter une maigre pitance et trouvent un peu de fraicheur à l’abri de murets en ruines. On laisse à gauche la crête du pic de Port Vieux, puis on longe un gouffre aux flancs rougeâtres qui évoque sans coup férir la gueule d’un cratère écumant de fumée.

Se succèdent plusieurs « croupes terreuses, couleur de bronze et nues comme le Soudan » et on gagne sans peine le Soum de Barroude (2.675 m) puis le point culminant (2.740 m), nanti d’un cairn effilé.

Le tour d’horizon est l’un des plus superbes des Hautes Pyrénées : Arbizon, Garlitz, pic d’Aret, pic de Thou, Lustou, Bachimale, Aneto, Posets, Suelza, Cotiella, Suca, sierra de Liena, Robinera, Perdido, Cylindre, Munia, Serre Mourène, Troumouse, Heid, Gerbats, Salettes, Gela, pic Long, Campbiel, Estaragne, Bastan, etc. Pour varier les perspectives et mieux observer la formidable muraille de Baroude dominée par l’aileron de squale du Gerbats, on peut redescendre versant français le chemin qui ramène à La Chapelle des Templiers d’Aragnouet après être passé auprès du refuge et des lacs de Barroude. À condition bien sûr d’avoir deux véhicules à sa disposition.

Historique

En juillet 1874, le comte Russell était parti d’Héas avec Célestin Passet dans l’intention d’explorer la région de Barroude, si perdue que les habitants Parzan en ignoraient l’existence. « Un montueux désert de cailloux et de neige, dont les montagnes pelées moutonnent comme des vagues brunes, à l’Est des précipices énormes de la Gela et de Troumouse : c'est une espèce de Mongolie. »

Il projetait de gravir un pic entrevu en 1869 lors de son ascension de la Munia : le pic de Barroude. Après avoir franchi les Hourquettes d’Héas et de Chementas, il bivouaqua au pied de la Muraille de Barroude : « Murailles de marbre à pic, lisses comme l’acier, hautes d’au moins 500 mètres et longues d’une demi-lieue. Au clair de lune, ces précipices sont effrayants ; ils ont l’air de s’ouvrir pour nous engloutir. ». Le lendemain, il monta directement à la cime. « Observatoire grandiose ! Vue superbe ! », s’exclama-t-il. « Il faut avoir vu les montagnes du haut en bas, pour se faire une idée de leurs mille accidents, de la complication de leur structure, et des distances réelles à parcourir entre deux sommets qui, sur la carte, sont proches l’un de l’autre ! Ce qui de loin semble une crête continue devient de près un labyrinthe ; ce qui semble horizontal devient une gorge qu’il faut des heures pour contourner. C'est là l’histoire de tous les jours, quand on explore une chaîne. »

Il redescendit sur Luchon en passant les ports de Bielsa, d’Héchempy et de Moudang. Le fond du cirque lui-même restait encore à défricher. Son ami Franz Schrader s'en chargea en 1877.