Ascension du pic de Perramo (2.909 m)

Accès routier  : Province d'Aragon, vallée de Venasque. Trois kilomètres en amont de Venasque, à la hauteur du camping Chuise, laisser son véhicule sur le parking (payant l'été) ou le garer en aval sur le bas côté de la route. Départ à 1.280 m.

Dénivelée  : 1.650 m.

Horaire : 9 à 10h A & R.

Difficulté : Itinéraire de belle ampleur destiné aux randonneurs aguerris, se déroulant pour partie hors sentier. Au-delà du lac d'Escarpinosa, le balisage n'est pas évident et il serait imprudent de s'aventurer plus loin par temps de brouillard. À partir de la mi-juillet, les crampons ne sont pas nécessaires, par contre une paire de bâtons télescopiques s'avérera utile. Sans être difficile, l'escalade de la crête réclame une certaine prudence.

Cartographie : Carte n°6 au 1 : 40.000e des Editions Pirineo (Parque Posets-Maladeta) nantie d'un livret explicatif (disponible en français dans toute la vallée de Benasque). Carte N°23 au 1 : 50.000e de Rando Editions (Aneto- Posets). Le pic de Perramo est nommé Tuca des Corbets, des Corvettas ou d'Escorbets sur certaines cartes espagnoles.

Bibliographie : Alain Bourneton : Les grandes Pyrénées (Editions Glénat, 1995). Miguel Angulo : Pyrénées 1.000 ascensions tome IV (de Bielsa au Val d'Aran) (Editions Elkarlanean, 2002). Alban Boyer & Jésus Pardina : Randonnées dans les Pyrénées aragonaises (Rando Editions, 1993)

Suivre en amont du parking le GR 11 qui remonte la superbe vallée d'Estos en direction du refuge éponyme, base de nombreuses ascensions dans le massif des Posets et le Haut Luchonnais. Partiellement empierré, il suit le rio Estos, passe devant la cabane de Santa Ana (1.485 m). On remarque à gauche un menhir dissimulé dans les fourrés, plus loin une source se déversant dans un tronc d'arbre évidé. C'est le moment de remplir sa gourde.

Au Pla de la Ribera (1.560 m), quitter le GR 11 et bifurquer à l'Ouest en direction des ibones de Baticielles. Le sentier grimpe en sous-bois, franchit une passerelle nantie d'un panonceau "no abandon el sendero" (ne pas abandonner le sentier) puis s'élève de croupe en croupe, entre pins à crochets, bosquets de rhododendrons et arbres foudroyés.

Sans s’éloigner du ruisseau, on côtoie une tourbière qui date peut-être de la préhistoire avant d’atteindre l'ibonet de Baticielles ou ibonet Pequeno, flanqué d’une vieille cabane de rondins (1.950 m). A ce niveau, on récupère provisoirement le GR 11.2 venu du refuge d’Estos. On arrive bientôt à l’ibon d'Escarpinosa (2.060 m), niché au sein d'un amphithéâtre dominé par l'Aiguille de Perramo, d’aspect dolomitique mais en réalité constituée comme ses consœurs de granit. (2h30 à 3h). Site superbe, qui constitue en soi un but de randonnée.

S'il existe un Eden sur terre, c'est ici qu'il faut le chercher, disait Henry Russell. Son ami Charles Packe, qui découvrit la contrée, abondait en son sens. Il est vrai qu'on y respire une paix qui semble ne pas être de ce monde. Mais laissons la parole à Russell, qui bivouaqua dans les parages en 1885, après sa conquête des pics d’Eriste et de Perramo : "Quels paradis terrestres que les lacs d'Escarpinosa et les immenses forêts qui les entourent, pour les explorateurs qui ont subi le charme irrésistible des ces lacs perdus dans les lointains déserts des Pyrénées, cachés sous les sapins, inconnus de la foule, et reflétant des pyramides sauvages de 3.000 mètres, des champs de neige à perte de vue, et le monde mystérieux des étoiles !"

Franchir le déversoir de l’ibon sur des troncs d'arbres morts, le contourner par le Nord puis grimper Sud-Est vers les Tucas d'Ixeya (ou Igea). Se rapprocher des falaises de droite à travers une zone de décombres et de blocs erratiques où, en cherchant bien, on trouve un cairn, amorce d’une sente assez raide qui franchit un ancien verrou glaciaire non loin d’une cascade.

Au terme de cette montée, on accède à l’orée du vaste cirque lacustre de Perramo (2.250 m) où il n'est pas rare de croiser une harde d'isard. Les grands champs de neige dont parlait Russell ont disparu pour céder la place à un amphithéâtre de rocaille où miroite une infinité d’ibones, plus admirables les uns que les autres.

Vue imprenable sur les Agullas de Perramo dont on longe le flanc oriental. La plus aigue (2.525 m), décrite par Russell comme « une pyramide phénoménale, solitaire, menaçante, verticale et toute noire », fut enlevée en août 1911 par Henri Brulle et Germain Castagné, qui avaient installé leur bivouac à proximité des ibones d’Escarpinosa, où « les truites se montrent à fleur d’eau. » Une première tentative échoua. Germain se déchaussa et déroula la corde. « Dalles lisses, drops et corners. Sommet très aérien. »

Sans cesser de suivre les cairns (rares par endroits), gravir une succession de banquettes mi-herbeuses mi-pierreuses en direction de la barrière granitique qui ferme le haut du cirque de Perramo.

La pente est sévère. On se rapproche de la selle rocailleuse (2.530 m) située à la base de la quatrième Agullas de Perramo, surnommée la Mesa, la plus haute en altitude malgré les apparences.

Moins rébarbative sous cet angle, on peut en faire l'ascension en escaladant l’éperon méridional en s’aidant des mains et des racines affleurantes des pins à crochets (II). Surprenante terrasse tabulaire (2.580 m) d’où on surplombe à la fois le vallon de Baticielles, celui de Perramo, et les trois autres Agullas.

Poursuivre à travers un plateau lacustre jonché de blocs épars, où on récupère le GR11.2.

Le maître de céans, qui règne sans partage sur ces contrées désolées, est désormais bien visible.

Une dernière rampe nous amène au collado de la Pllana (2.700 m).

Vue plongeante sur l’ibón de la Pllana, une vingtaine de mètres plus bas,

Du col, contourner l'éperon orangé puis gravir versant Eriste un toboggan d'éboulis instables qui débouche sur la crête.

En suivre plus ou moins le fil, ou en contrebas versant oriental, sur des blocs instables et modérément exposés (I+). Plus longue qu’il n’y parait, il faut compter ¾ d’heure voire une heure pour en toucher le culmen. Etroite, aérienne par endroits, elle est ponctuée de plusieurs brèches que l’on négociera avec prudence. D’autant que le granit n’est pas de première jeunesse.

Ce pic qui se mérite offre un panorama dont on rencontre peu d’équivalent dans les Pyrénées. De ses 2.900 m, il domine à la fois le vallon de Perramo et celui de Grist (Eriste). De son étroite cime, la vue sur le massif des Posets, la Forqueta et les Eriste est sublime. Au Nord, le Clarabide, le Perdiguère, les Gourgs-Blancs et les sommets du Haut-Luchonnais. Au Nord-Est, les Tucas d'Ixeya, rarement visitées. A l’Est, le massif de la Maladeta. Au Sud-Est, le Ballibierna. Au Sud, le Turbon. Au Sud-Ouest, le Cotiella.

Descente du Perramo : De la cime, pour éviter de revenir au col de La Pllana, abandonner la crête à mi-parcours et dévaler les éboulis (raides) de la face Est en visant la base de la Mesa de Perramo.

Descente par le vallon de Baticielles : Récupérer en vue du chaînon des Agullas le GR11.2 qui descend dans le chaos de ruines tombées des parois des Agullas de Perramo. Les cairns sont rares, la trace effacée, et la vigilance est de mise au passage des blocs branlants.

On aperçoit bientôt les ibones étagés de Baticielles. Le sentier gagne en netteté à l'entame de la descente vers l'Ibonet et sa cabane, où on récupère le chemin de l’aller.